publié le 20 avril
Qui, plus que Triumph, est pleinement légitime pour reconstruire des gammes de motos qui sentent bon la nostalgie ? En exhumant notamment le patronyme "Speed Twin", qui, pour rappel, fut lors de son lancement en 1937 l'un des premiers bicylindres à l'anglaise à connaître un vrai succès commercial car c'était une moto vraiment moderne pour son temps.
Moderne, la Speed Twin l'est aussi, même si elle cultive avec talent des lignes classiques qui séduiront les amateurs de motos au design intemporel. Car avec son moteur bicylindre 1200 cm3 de dernière génération et sa dotation électronique complète, la nouvelle Triumph 1200 Speed Twin ratisse large, un peu comme l'a fait une certaine BMW R nineT il y a quelques années. Et l'on ne serait pas surpris de voir que l'Anglaise cherche à faire tomber l'Allemande de son piédestal.
Hors du temps
Un joli moteur avec des ailettes (et un système de refroidissement liquide bien masqué), un joli réservoir un peu rondouillard, des soufflets de fourche : ça, c'est du classique. On continue avec les jolies sorties d'échappement "en cornet", les roues et pneumatiques de taille raisonnable, et la Speed Twin achève de vous persuader qu'elle a une posture un peu hors du temps, même si Triumph a choisi un traitement "dark", que ce soit pour les éléments périphériques (roues, fourche, carters moteur, silencieux d'échappement) que dans les coloris, plutôt sombres (noir, gris, rouge foncé), ceci afin de donner à la Speed Twin une posture un rien sportive et de la différencier des Bonneville, dont les nombreux éléments chromés apportent une touche de classe supplémentaire. Ensuite, on ne peut que louer, comme toujours chez Triumph depuis quelques années, le soin apporté aux détails et autres traitements de surface : entre les logos, les petites pièces en aluminium brossé, les touches de LEDs sur l'éclairage, les petites fenêtres digitales dans le tableau de bord, la Speed Twin séduit par son sens de la présentation.
Roadster nostalgique et moderne
Là, c'est simple : la Speed Twin dispose de la dernière génération de moteur bicylindre 1200, qui existe dans différents niveaux de puissance et de couple, selon la philosophie de la machine à laquelle elle est destinée. Alors que le bicylindre 900 des Street Twin et autres Street Scrambler peut être bridé pour les permis A2, le "gros" 1200 est réservé aux motards expérimentés, qu'il développe 80 chevaux dans une Bonneville, 90 dans un Scrambler ou 97 dans une Thruxton. Le cas de la Speed Twin est clair : il dispose de la configuration la plus puissante, tout comme le café racer Thruxton. Mais la Speed Twin n'a pas droit au châssis haut de gamme de la Thruxton R, avec ses suspensions Öhlins raffinées et ses freins Brembo radiaux. Par contre, elle reprend des éléments plus basiques de la Thruxton classique : est-ce à dire qu'il s'agit d'une version plus abordable du café racer. C'est exactement cela, oui : l'ergonomie est plus évidente, avec une position de conduite plus droite, un guidon qui tombe naturellement sous la main, une selle basse (807 mm), des repose-pieds moins en arrière (de 38 mm) et plus bas de 4 mm. Triumph a voulu faire de cette Speed Twin un roadster nostalgique à l'allure sportive et à la grande facilité de conduite, et a parfaitement atteint son objectif.
Plaisirs essentiels
Ça, une 1200 ? On a un petit doute en s'installant au guidon, tant la facilité de prise en main et l'excellente agilité vous font douter d'être au guidon d'une si grosse cylindrée. Néanmoins, dès que l'on tourne la poignée, le bicylindre s'exprime sans filtres et délivre alors de belles sensations de conduite. Le couple généreux du moteur (112 Nm) est disponible ) à 6000 tr/mn, mais une grande quantité s'offre à vous bien plus bas. De fait, bien aidée par une démultiplication secondaire pas trop longue (on se retrouve à 4000 tr/mn à 120 km/h en sixième), les reprises sont instantanées et ne nécessitent pas de rétrograder, même si la boîte précise rendrait l'exercice transparent. Posée sur ses pneus étroits, la Speed Twin virevolte d'un virage à l'autre, et son châssis sain rend la balade sur le réseau secondaire particulièrement appréciable, même à un rythme plus enlevé, sans toutefois la brusquer, car c'est alors que les freins et les suspensions haut de gamme de la Thruxton R apparaissent comme des petites douceurs qui font alors défaut (et qui justifient les 3000 € d'écart) ; néanmoins, on parle là d'un rythme de conduite auquel ne souscrivent pas trop les amateurs de motos classiques. Restent ce design soigné, l'allonge du bicylindre et la sonorité profonde et grave des échappements : sur une petite route, avec des petites fleurs sur les bas-côtés et un petit rayon de soleil, on n'est pas loin dans l'expression des plaisirs les plus essentiels de la moto.